Dr. M. MARTAH
Plût au ciel que le lecteur enhardi et devenu momentanément féroce
comme ce qu'il lit, trouve, sans se
désorienter, son chemin abrupt et sauvage,
à
travers les marécages désolés de ces pages sombres et pleines de poison
;
car, à moins qu'il n'apporte dans sa lecture
une logique
rigoureuse et une tension d'esprit égale au
moins à sa défiance,
les émanations mortelles de ce livre
imbiberont son âme comme l'eau le sucre.
Lautréamont, Les Chants de Maldoror (1869)
La
double acception de la production et de la réception des textes littéraires ne
peut en aucun cas se passer de la notion du genre. En effet, cette notion qui est à revoir du point de
vue définitionnel, constitue l'élément fondamental dans le choix de lire ou de
ne pas lire un texte littéraire, et ce indépendamment de son origine, de sa langue et de ses
influences. Le genre s'impose donc tel
un préalable à l'écriture et à la lecture d'une œuvre littéraire. Une fois défini et
décidé dans l'acte scripturaire, le genre détermine l'horizon d'attente à la
fois souhaité par l'auteur et consenti par le lecteur. Aussi, est-il légitime de poser cette question fondamentale: est-ce
que la loi du genre constitue un réel défi à l'acte de réception ?
De cette
question, objet de notre communication,
et à laquelle nous répondrons par la positive, découlent d'autres
interrogations tout aussi importantes :
-
Avons-nous besoin des genres pour comprendre les textes littéraires ?
-
Quelle est la part du genre dans l'acte de lire ?
-
Quelle en est l'incidence sur la réception en tant
qu'expérience esthétique ?
-
Quel en est l'impact sur l'interprétation ?
-
La production du sens est-elle dépendante d'une
connaissance préalable du genre dans et à travers lequel s'énonce l'œuvre d'art ?
Pour
répondre à toutes ces questions, l'approche herméneutique nous sera d'un grand
secours. Elle explique la relation, en tant que phénomène, entre le texte et
son ou ses genre(s) avant d'inclure dans cette logique de corrélation
l'instance du lecteur, lui-même, producteur de sens. Bientôt l'approche va
prendre une autre perspective lorsque genre et interprétation seront mêlés, non
sans bonheur d'ailleurs, à la lecture comme expérience esthétique.
Dès lors, cette approche, impliquant trois domaines
de recherche, notamment la réception, la généricité littéraire et l'interprétation, va prendre la
forme d'un défi à relever surtout quand il s'agit du renouveau de la théorie de
la littérature.
Revenir sur les principes épistémologiques de
la généricité, revisiter l'expérience esthétique de la lecture et reconsidérer les bases théoriques de la
réception, constituent des atouts théoriques afin de mieux être dans
l'interprétation. Une surconscience du lecteur « lettré »[1] est requise afin d'éviter de tomber dans les
anachronismes ou dans les contre-sens.
Il
est à constater que depuis la deuxième
moitié du XXe siècle, l'œuvre d'art se
laisse approcher tel un phénomène ; la notion du genre peut se laisser appréhender, elle aussi, dans le sens d'une phénoménologie
de la lecture dans sa corrélation avec l'écriture. Pour qu'il y ait concrétisation
de l'œuvre d'art (selon le sens de Hans-Robert JAUSS Pour une esthétique de
la réception, 1970), la coopération du lecteur est requise. Cette
coopération est désormais intelligible ; elle émane d'un engagement au niveau
de sa connaissance et de sa maîtrise de l'œuvre dont il fait acte de réception.
Sa jouissance, qui se transforme en expérience esthétique[2], est essentiellement épistémologique. Le
plaisir de lire a lieu quand a lieu la reconnaissance générique. Cette notion
de jouissance esthétique cognitive s'accomplit pleinement quand le lecteur fait
preuve d'une maîtrise de la question du genre, de la prise en compte de ses
mutations à travers le temps[3] et suivant les changements qui surviennent
dans l'horizon d'attente de ses différents publics à travers l'histoire, qu'il
s'agisse d'une œuvre nouvelle, d'une
œuvre consacrée par la tradition (œuvre dite universelle) ou qu'il s'agisse
encore d'œuvres successives.
En
effet, Wolf Dieter Stempel stipule que la réception d'une œuvre littéraire, à
condition de sa concrétisation et de son actualisation, devient elle-même un
processus générique[4]. Les lecteurs se succèdent et, par la force
des choses, la lecture devient expérience esthétique intersubjective. A ce
propos, Jauss avance le concept de fusion des horizons d'attente (Pour une
esthétique de la réception 1970. A ce niveau de l'analyse,
qu'adviendrait-il des genres littéraires
? Dans cette mutation fusionnelle de l'expérience esthétique, la généricité, en
tant que constance immuable, finit par montrer ses limites. De toute évidence,
la réception effective a fini par affecter la structure générique de l'œuvre
d'art. Ceci est perceptible dans le cas
des influences (entre auteurs), des traductions et des adaptations d'une œuvre
d'art pour un public géographiquement éloigné. Là, encore,
une question s'impose : le genre, pour rester dans son acception
aristotélicienne, possède-t-il des facultés transtextuelle, translinguistique
et transculturelle ? L'interdépendance entre signifiant et signifié, forme et
fond, langage et fiction, genre et représentation fait qu'il paraît difficile de créer des scissions à
l'intérieur de chacune de ces binarités.
Mais
dans le cas d'une lecture, et plus particulièrement d’une traduction - véritable
appropriation - cette scission devient possible. Non seulement le sens devient
pluriel, mais le genre littéraire, véhicule de ce sens, devient lui-même objet
d'éclatement. Cependant, si l'acte traducteur se solde par une déception de
l'attente et donc par un échec de la lecture, c'est que l'ensemble[5] de l'œuvre d'art a rencontré une frontière[6].
Cette
notion de genre devient alors insuffisante s'agissant de vouloir tout énoncer,
ou quand il s'agit, dans une fiction, en construction, de passer d'un registre
à un autre, d'un mode à un autre ; là où se mélangent réalisme, fantasmagorie
et fiction ; là où a lieu l'avènement des mélanges des genres ; là encore où
l'écriture, elle-même, veut se faire objet central de l'œuvre, en se regardant
en tant qu'expérience esthétique en cours de réalisation ; là où la critique
s'associe au fragment et là où poésie, philosophie et histoire se marient dans un transgression généralisée de
la loi du genre.
En
outre, il ne peut y avoir d'effet esthétique que ce soit chez Jauss, Chez Eco ou chez Iser[7], que lorsque l'acte de lire se veut un acte
intelligible au sens pratique du terme, c'est-à-dire qui concrétise le texte
reçu en lui donnant une forme esthétique nouvelle dans une structure générique
nouvelle[8]. Cette forme de réception
reste l'expression d'une « expérience de la production sémiotique [et donc]
d'une nouvelle configuration générique »[9]. Il est certain que l'expérience esthétique
différenciée présuppose une mutation dans l'horizon d'attente qui tiendrait
compte de la spécificité culturelle du lecteur issu d'un horizon culturel.
Toutes
ces considérations constituent un double enjeu à la fois esthétique et
historique. Enjeu esthétique dans la mesure où
auteur et lecteur passent par une expérience esthétique particulière et
subjective ; enjeu historique, car ils participent tous les deux à
l'historicisation de l'œuvre d'art (l'expérience devient intersubjective).
L'acte
de lecture requiert de la part du
lecteur « une coopération interprétative »[10] de grande intellectualité. C'est ce qui nous
a amené à raisonner en termes de défi à relever une fois en contact avec une
œuvre d'art, et ce à plusieurs niveaux :
Au
niveau du sens : suivant la nature du texte on passe de la pluralité à la
surenchère des significations (l'œuvre est ouverte).
Au
niveau du langage : la distinction entre langage ordinaire et langage poétique
est obligatoire (la poéticité de l'œuvre).
Au
niveau de la lecture : L'attirance vers
un texte suppose une certaine jouissance esthétique (le plaisir du texte).
Au
niveau de l'histoire : le recoupement synchronique et diachronique impose une
implication du lecteur dans l'histoire de la littérature (la lecture est un
acte historiographique).
Au
niveau cognitif : la lecture suppose connaissance et reconnaissance du
savoir-faire de l'auteur. Elle fonctionne suivant une logique de continuité ou
de rupture avec les œuvres du passé. (l'œuvre littéraire suppose de la
connaissance).
Au
niveau du genre : il existe des œuvres qui ne s'inscrivent sous la bannière
d'aucun genre ou qui se réclament de tous les genres possibles et imaginables
(l'œuvre d'art est totale, éclatée).
La production du sens ne peut, en littérature,
s'effectuer en dehors de la textualité. De même que la mise en forme d'une
écriture en crise ne peut se concevoir en dehors d'un genre lui-même en
souffrance. Le plus important est de constater qu'il est impossible de produire
une œuvre innovante sans qu'elle ne remette en question la généricité en tant
que notion déterminant l'écrit. « Tout véritable chef-d'œuvre a violé la loi d'un genre
établi, semant ainsi le désarroi dans l'esprit des critiques qui se virent dans
l'obligation d'élargir le genre » B. Croce, Estetica, Bari, 1902[11]. Paradoxalement, l'écrit, lui-même, ne peut se
concevoir en dehors d'une évolution des genres.
Il est
indéniable de souligner que la notion de genre préexiste à l'œuvre d'art, elle lui offre un cadre
de légitimité référentielle et une reconnaissance académique. Elle est le garant d'une expression poétique en
parfaite concordance avec le mode de représentation, départagé entre
Dramatique, Epique et Lyrique[12], et respectivement correspondants à la faculté de désirer, à
celle de connaître et enfin à celle de sentir. Présenté sous cette forme, ce
mode de représentation mimétique se veut selon la tradition aristotélicienne un
système clos de représentation générique. La question à poser dès lors est la
suivante : Est-ce que ce mode de représentation est infaillible ? De toute évidence,
non. Bien que l'intelligibilité du texte suppose une grande maîtrise des genres
littéraires, il n'en demeure pas moins vrai que cet héritage générique soit
façonné par les écrivains qui se transmettent ce savoir, qui le mettent en
pratique à travers leurs écrits et qui le soumettent à l'appréciation des
lecteurs, chacun selon son interprétation et selon son horizon d'attente.
Le genre littéraire représente un véritable
mécanisme régulant le processus de la réception ; il peut même s'apparenter à
un « conditionnement générique de la concrétisation »[13] ou encore à une « instance qui assure la
compréhensibilité du texte du point de vue de sa composition et de son contenu
»[14]
Pouvons-nous
nous aventurer plus en avant et dire que les genres littéraires sont
interprétables. Dans ce cas précis, et puisque
l'interprétation est inévitablement historique, le genre se prête à une
appréhension plurielle. Déjà, la théorie des genres n'est plus réductible aux
trois genres consacrés par la tradition aristotélicienne. En témoignent tous
ces genres appelés « espèces poétiques », « genres inférieurs », « genres
mineurs », « petits genres » qui interviennent pour que, d'une part, la mimésis
soit plus élargie et pour que, d'autre part, la considération poétique de ces genres dits non « représentatifs »
soit rétablie. L'évolution du champ littéraire, selon les propos de Gérard
Genette, « détermine la réserve de virtualités génériques»[15]. Le genre n'est plus à considérer comme
composante sui generis et unique
à l'œuvre littéraire en tant que reproduction fidèle d'une forme qui
préexiste à cette même œuvre. Dans le cas de l'intertextualité - une autre
forme d'actualisation où les textes
s'entrecroisent à l'infini suivant des procédés tantôt avoués, tantôt omis- il
est impossible de suivre les traces de tel ou tel genre, de tel ou tel mode. Il
est tout autant chimérique de suivre les
traces textuelles premières, qui n'existent pas d'ailleurs. A l'intertextualité
correspond une inter-généricité désordonnée et dont les contours sont flous
surtout quand il s'agit de faire des emprunts dans une autre langue et dans une
autre culture.
Nous
assistons alors à une forme d'évolution - pour ne pas dire ‘'abaissement''- des formes génériques naturelles (ou genres
supérieurs) vers des espèces poétiques (ou genres inférieurs) plus appropriées et plus adaptées aux textes
en construction. Cette évolution que nous appellerons glissement générique est essentiellement un fait émanant
d'un acte de lecture ayant abouti à une actualisation et à une concrétisation.
Retracer les contours historiques de la notion du genre est certes utopique, mais nous
pouvons en établir l'histoire des glissements génériques, tenant compte des lectures successives chacune suivant son
horizon d'attente. D'un genre à un autre (inférieur soit-il), de la tragédie
destinée aux rois et aux nobles à la comédie destinée à un public moins averti,
moins connaisseur et peu lettré, les critiques ont assisté à un glissement
générique où l'acte de réception continue à jouer un rôle historique décisif,
et ce grâce aux changements incessants des publics successifs. Dire qu'une
œuvre est universelle, c'est une métaphore. Révéler, génériquement le pourquoi
de cette universalité, voilà qui est d'un intérêt capital pour l'historicisation
de la littérature, de ses lectures et de
ses genres et sous-genres.
De la
hiérarchisation aristotélicienne à la réglementation académique, le genre a
toujours fait l'objet d'une considération politique, idéologique et esthétique.
Le respect des genres émane d'un conformisme heureux tant que des auteurs s'y
complaisent et tant que les lecteurs s'y reconnaissent esthétiquement,
vérifiant ainsi sa parfaite correspondance avec leur horizon d'attente.
En effet, Antoine Compagnon, dans sa série de leçons à propos des
genres littéraires[16], souligne l'importance du genre pour
l'énonciation, pour l'interprétation et pour la réception des textes
littéraires. « Même si le sens est
inhabituel et toujours sous certains aspects uniques, écrit-il, le locuteur
sait qu'il doit prendre en compte la compréhension du destinataire. Il y a donc
un transfert de systèmes d'attentes : un dédoublement du locuteur, une
compétence générique partagée. Les sens font partie d'une compétence spatiale,
et le texte sans genre reste un mythe »[17] A ce propos, nous pouvons dire que le genre
est infiniment intrinsèque au texte, mais, le reste-t-il indéfiniment ?
L'expérience esthétique concrétisant le
sens d'une œuvre littéraire est-elle en mesure de respecter le genre
intrinsèque? Suivant la logique de la succession des lectures à travers le
temps et l'espace, non seulement l'œuvre devient ouverte, mais les genres
subissent un éclatement conséquent. Pourtant, et « suivant le point de vue
de la lecture, écrit A. Compagnon, les genres restent les catégories dominantes
de la réception »[18]qu’ils
soient conscients ou non, révélés ou laissés sous silence.
Considérons
ce passage tiré des Chants de Maldoror
de Lautréamont (Isidore Ducasse). Dans cet exemple, et il y en a d'autres, « le
lecteur passe par (…) diverses présuppositions génériques au fur et à mesure de
sa progression »[19]. Ici, la part du genre reste une simple
présomption, une hypothèse au lieu d'être un engagement ou une promesse, et
ce à un moment où, pendant la première
moitié du XIXe siècle, la question des
genres était une affaire d'orthodoxie. La deuxième moitié de ce même siècle, et pour des raisons esthétique et
philosophique, va être témoin de l'avènement de ce que la critique a appelé «
modernité ». Nous concernant, cette modernité reste synonyme de
décloisonnement générique à tous
azimuts. Baudelaire, Rimbaud, Lautréamont, Mallarmé vont produire des œuvres
que la critique qualifiera de « grande », « totale » et de transgressive. Ce
qu'Antoine Compagnon qualifie d' « indifférence au genre »[20]. Ce
qui va faire prévaloir l’œuvre (le livre) en sa qualité indéniable de produit appartenant à la littérature seule. « Tout
se passerait donc comme si, les genres s'étant dissipés, la littérature
s'affirmait seule, brillait seule… »[21]
En effet,
avec les Chants de Maldoror, œuvre
hybride, atypique, génériquement
inclassable, nous assistons, à mesure que la lecture progresse, à
l'avènement du plagiat à la fois
reconnu, défendu et mis en pratique « le plagiat est nécessaire écrit-il… », et
de continuer « la poésie doit être faite par tous et non par un pauvre Hugo… ».
Lautréamont avait-t-il une idée précise du caractère « total » de son œuvre ?
Une chose est sûre, il n'écrit pas dans la conception du «genre intrinsèque ».
Avait-il une idée précise quant au devenir générique de son œuvre ? L'hybridité
textuelle ne peut se réaliser que dans le cadre d'un mélange parfait où il n'y
aurait plus de frontières entre les genres. « Au bout de la transgression
générique, disparaissent les valeurs et les normes»[22]. Interpréter une œuvre appartenant à la
modernité (œuvre dite totale ou impure),
suivant des schémas génériques traditionnels serait l'équivalent d'un échec au
niveau de l'horizon d'attente.
Pour
souligner la pertinence de la correspondance texte / genre(s), il est licite de mesurer l'impact de
la généricité sur l'acte de lire en vue d'une concrétisation et d'une
actualisation. Faire acte de lecture ou de réception dans et par la
transgression (parce que le texte transgresse les lois de la production
esthétique), c'est en même temps reconnaître négativement les genres et donc
leur prééminence.
Transposer
cette transgression générique dans l'acte de lire est une expérience esthétique
en soi. Bien qu'elle s'inscrive dans une logique du non, elle n'en demeure pas
moins un acte historiographique de grande importance. C'est l'histoire
littéraire telle qu'elle est voulue par Han-Robert Jauss : à la fois l'histoire
de la production et de la réception des œuvres, même si l'une comme l'autre se
placent sous le signe de la transgression des genres. L'horizon d'attente
décrété par l'auteur et consenti par le lecteur se réalise sur le plan de la
généricité textuelle, qu'il s'agisse de conformité ou de transgression de la
notion de genre. A la question : est-ce que le genre constitue un réel défi à
la réception ? Nous répondrons par oui, mais à la condition d'envisager un
horizon d'attente de la transgression esthétique, c'est-à-dire qui tienne
compte de la possible hybridité générique d'une œuvre littéraire.
[1] Référence explicitement faite ici à Stéphane
Santerres-Sarkany dans son livre Théorie
de la littérature, Paris, P.U.F. « que sais-je ?», 1990, p.67.
[3] A ce
propos Karl Viëtor, dans son article « L'Histoire des genres littéraires » avoue qu'on « ne peut tracer une fois pour
toutes le contour matériel de l'histoire des genres » publié dans Théorie des Genres
(collectif), Seuil, «Points », 1986, p.
34.
[4] Cf.
Wolf Dieter Stempel, « Aspects générique de la réception », in Théorie des genres, Op.cit., pp. 161-178.
[5] L'œuvre et son genre constituent un « tout »
que le traducteur et le lecteur doivent obligatoirement saisir.
[6] La
notion de frontière renvoie plus particulièrement aux différences culturelles
qui ont une incidence sur la prédisposition esthétique qui, elle, décide dans
l’acceptation ou pas du genre. Il y a frontière tout simplement parce que
l’horizon culturel de la production et celui de la réception sont différents de
part la langue, le contexte, le public récepteur de Molière adapté au théâtre
marocain. En effet, l'adaptation de la
quasi-totalité de Molière pour le théâtre Marocain s'est faite dans le dialecte
marocain. Ce fut un succès mémorable. La critique dramatique était divisée
entre le pour et le contre. Et à aucun moment cette critique n'a réussi à
soulever la question sur le plan esthétique : adaptation, oui, mais selon
quelles normes génériques ? Quel horizon d'attente pour quelle production
esthétique ? Le récepteur Marocain a-t-il eu une expérience esthétique
préalable de ce qu'est la comédie et de ce qu'est le tragi-comique ? La
jouissance esthétique, en tant qu'expérience, a bien eu lieu malgré le fait que
la notion du
genre du texte adapté (comédie ou tragi-comédie) est complètement étrangère à
l'horizon d'attente spécifique au spectateur, voire aux spécialistes marocains
du théâtre proposé par T. LAÂLAJ. Le genre est en crise et l'horizon d'attente
l'est autant.
[7] Jauss avance
la notion de concrétisation du texte littéraire par la production du sens ; Eco
parle des « interstices » ou des « espaces blancs » à remplir par l'acte de
lire (principe de coopération) et Iser amène la notion de corrélation entre
auteur et lecteur.
[8] De
Lautréamont aux surréalistes, de l'œuvre ressuscitée à l'avènement du
surréalisme en passant par l'actualisation par l'acte éditorial entrepris par
Ph. Soupault. La publication qui s’en est suivie était placée sous le signe d’une
réception de transgression d’écart
esthétique et de fusion de l’horizon esthétique .
[9] Wolf
Dieter Stempel , « Aspects générique de la réception », in Théorie des genres, Op.cit., p. 170.
[12] Au
lieu de cette désignation générique,
Goethe préfère parler de « formes naturelles » et tout ce qui est ballade,
épigramme, récit, ode, satire, etc. sont pour lui des espèces poétiques ;
reproduisant ainsi la binarité biologique, genre et espèce.
[13] Wolf
Dieter Stempel , « Aspects générique de la réception », in Théorie des genres, Op.cit., p. 168.
[15] G.
Genette, « Introduction à l'architexte » in Théorie
des genres, Op.cit., p. 154./ ou in Fiction et diction, Paris, Seuils, «
Points essais », p. 77
[16] A.
Compagnon, « Genres et réception » In Fabula
[consulté le 14/04/13]
http://www.fabula.org/compagnon/genre4.php
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